Membre d’une famille recomposée où tout se passe pour le mieux, vous avez été adopté par le conjoint de l’un de vos parents. Changement de régime matrimonial, donation entre époux, tout a été fait pour protéger le conjoint survivant. Au décès de votre parent, vous apprenez que l’adoption a été révoquée. Quelles sont les conséquences de cette révocation ? Quels sont vos recours ? Focus sur ce que vous devez savoir.
Dans le cadre d’un remariage, il n’est pas rare que les époux, pour se protéger, consentent à des avantages matrimoniaux l’un envers l’autre. Le plus souvent, il s’agit d’un changement de régime matrimonial en faveur d’une communauté universelle ou encore d’une donation entre époux.
Ces avantages sont définis par le Code civil comme « les avantages que l’un ou l’autre des époux peut retirer des clauses d’une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations » (article 1527 al 1 Code civil).
Cependant, lorsque survient le décès de l’un des époux, ces actes peuvent avoir des conséquences sur les enfants qui ne seraient pas issus de l’union en amoindrissant voire anéantissant leur héritage.
Selon le Code civil, ces avantages sont traités comme des libéralités. Dès lors, l’avantage excédant la quotité disponible spéciale offerte au conjoint survivant vient porter atteinte à la réserve héréditaire des enfants non issus des deux époux.
Ainsi, ces derniers peuvent, grâce à l’action en retranchement, faire réduire les effets des avantages matrimoniaux consentis entre les époux.
Dans le cadre d’une succession, si vous êtes un enfant issu d’un premier mariage, ou d’une précédente union, ou encore issu d’une relation adultérine et que le défunt est votre parent, l’action en retranchement vous est ouverte.
Mais qu’en est-il des enfants non issus des deux époux ayant fait l’objet d’une adoption ?
Dans le cadre d’une succession, l’action en retranchement est ouverte aux enfants non issus des deux époux. Ainsi, tout enfant légitime, naturel ou adultérin peut l’exercer.
Or, la question s’est posée d’un enfant adopté. Dans cette hypothèse, un enfant issu d’une précédente union est adopté par le nouveau conjoint de son parent.
Des difficultés ont pu survenir lorsque le parent biologique de l’enfant décède et qu’après ce décès, son parent adoptif révoque son adoption.
La Cour de cassation est venue trancher cette question par plusieurs arrêts, notamment par un arrêt de la première chambre civile, le 9 juillet 2014 (n° 13-19013).
En l’espèce, un homme a eu un enfant d’une précédente noce. Sa femme consent à une adoption simple de l’enfant né du premier lit. Au cours de leur mariage, les époux changent de régime matrimonial au profit d’un régime de communauté universelle et prévoient une clause d’attribution intégrale des biens communs au conjoint survivant.
L’enfant adoptif perd son père et apprend, postérieurement à l’ouverture de la succession, que son adoption a été révoquée par sa belle-mère.
La Cour de cassation a considéré que l’action en retranchement des avantages matrimoniaux consentis n’était pas ouverte à l’enfant adopté, et ce même si l’adoption a été révoquée après le décès de son parent.
Pour la Cour, « la nature et l’étendue des droits successoraux des héritiers s’apprécient au regard de leur situation à l’ouverture de la succession ». Dès lors, à l’ouverture de la succession, l’adoption n’avait pas été révoquée et permettait d’assimiler l’adopté comme un enfant commun du couple.
Lorsqu’une adoption est révoquée après un décès, l’enfant ne peut user de l’action en retranchement, il se retrouve sans recours.
Dans cette situation, si une clause d’attribution intégrale a été prévue dans le contrat de mariage, l’intégralité du patrimoine peut revenir au conjoint survivant.
En outre, la révocation de l’adoption ne permettra pas à l’enfant d’obtenir une part d’héritage dans la succession du conjoint survivant.
Toutefois, il convient de préciser qu’une révocation d’adoption simple ne peut intervenir que si elle est justifiée par des motifs graves (article 370 Code civil).
N’attendez pas l’ouverture d’une succession pour organiser votre succession prenez vos précautions.