Si les contrats d’assurance-vie sont attrayants pour bon nombre de personnes puisqu’ils permettent de faire sortir une partie du patrimoine de sa future succession, ils n’en sont pas moins source de conflit. Vous venez de perdre un proche et vous vous rendez compte que le contrat d’assurance-vie qu’il avait ouvert au bénéfice d’un tiers vide la succession de toute substance. Vous vous demandez comment faire pour récupérer votre part d’héritage. Sachez qu’il est dans certains cas possible de contester le contrat d’assurance-vie.
Le Code des assurances prévoit que le capital ou la rente émanant du contrat d’assurance-vie de l’assuré ne font pas partie de la succession du défunt.
En outre, la reconstitution du patrimoine du défunt ayant pour objet la préservation de l’égalité entre les héritiers n’a pas vocation à s’appliquer.
Ce principe est toutefois limité en ce que les primes versées sur le contrat d'assurance-vie ne doivent pas être manifestement exagérées. Cette limite a pour but d’éviter toute atteinte à la réserve héréditaire, cette dernière correspondant à la part des biens et des droits successoraux revenant de droit aux héritiers réservataires.
Sachez qu’en tant qu’enfant vous avez la qualité d’héritier réservataire. La possibilité vous est ainsi offerte de contester l’assurance-vie ouverte par le défunt lorsque celle-ci porte atteinte à vos droits. Reste à savoir ce que recouvre la notion de primes manifestement exagérées.
Les primes sont dites manifestement exagérées lorsqu’elles ont conduit à un appauvrissement de l’assuré dès lors qu’elles étaient excessives au regard de ses facultés.
La Cour de cassation a précisé que l’appréciation de l’excès manifeste des primes, au moment du versement de celles-ci, repose sur le triple critère de l’âge et de la situation familiale et patrimoniale du souscripteur (Cass. 2e civ., 16 avril 2015).
De plus, ces critères, et notamment celui tiré de l’âge, impliquent de rechercher, pour apprécier l’excès manifeste des primes, l’utilité du contrat pour l’assuré (Cass. 1re civ., 7 février 2018).
Il en résulte que l’appréciation de l’excès manifeste des primes relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond.
La Cour de cassation a considéré qu’une prime d’un montant de 46.000 €, provenant de la vente d’un immeuble, versée par une personne disposant de 800 € pour vivre par mois était exagérée dès lors que ce montant était insuffisant pour lui assurer ses frais de séjour en maison de retraite (Cass. 2e civ., 1er juillet 2010). Ainsi, les primes devaient être réintégrées à la succession.
Dans une autre affaire, la Cour de cassation n’a pas retenu le caractère manifestement exagéré d’une cotisation de plus de 15 millions de francs qu’avait souscrit l’assuré pourtant malade. En effet, malgré son état de santé, l’espérance de vie de l’assuré a pu être démontrée et la somme concernée représentait moins de 14% du capital des époux mariés sous le régime de la communauté légale (Cass. 1re civ., 8 juillet 2020).
La démarche vise à tenter de disqualifier l’opération d’assurance en démontrant l’absence d’aléa, et requalifier l’acte en donation afin de l’inclure dans la base de calcul de la succession.
Cette démarche est très technique non seulement au regard du droit mais également au regard de la structure même du contrat d’assurance-vie.
La sophistication du contrat rend la tâche délicate puisque ce dernier permet de rentabiliser une épargne déposée tout en couvrant l’aléa lié à la vie, permettant en outre la transmission de son patrimoine hors succession.
Les atouts de ce type de contrat ont conduit à des abus de la part des gestionnaires de patrimoine, conduisant de plus en plus d’héritiers lésés à agir en justice.
Si vous souhaitez échanger avec nos lecteurs sur la question des assurances-vie, n’attendez plus pour consulter notre forum héritage et succession.