Vous avez ouvert une assurance-vie afin que vos héritiers puissent bénéficier d’avantages fiscaux intéressants au moment de votre décès. Souscrire une assurance-vie est une pratique de plus en plus courante, mais les souscripteurs comme leurs héritiers ignorent en général les effets de ce contrat. Cela peut s’avérer problématique quand les prévisions du souscripteur ne se réalisent pas. Que se passe-t-il si le bénéficiaire meurt avant le souscripteur ?
Les conséquences qui découlent du prédécès du bénéficiaire dépendent de la qualité de celui-ci. Il est courant que les époux souscrivent un contrat d’assurance-vie en faveur de leur conjoint afin de protéger le conjoint survivant. L’assurance-vie étant en principe hors succession, ce dernier n’aura en principe pas à s’inquiéter du paiement des droits de succession (toutefois ces sommes ne doivent pas excéder les ressources du souscripteur, sous peine de tomber dans la succession C.Assur, art.L132-13).
Il est courant que les époux souscrivent un contrat d’assurance-vie en faveur de leur conjoint. Si l’époux bénéficiaire du contrat décède avant le souscripteur, le contrat ne se dénoue pas et l’époux souscripteur pourra changer de bénéficiaire.
Cependant, lorsque les époux sont mariés en communauté de biens, il est fréquent que les primes de l’assurance aient été payées par des fonds communs. Il convient de préciser que depuis le 1er janvier 2016, le rachat de l’assurance-vie par des fonds communs n’est pas intégré dans l’actif de la communauté lors de la liquidation et donc ne constitue pas un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation (RM Ciot, n°78192, JO AN du 23 février 2016).
Le Code des assurances dispose : « l’attribution à titre gratuit du bénéfice d’une assurance sur la vie à une personne déterminée est présumée faite sous la condition de l’existence du bénéficiaire à l’époque de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis, à moins que le contraire ne résulte des termes de la stipulation » (art. L132-9).
Plusieurs questions peuvent être soulevées quant au décès du bénéficiaire avant le souscripteur notamment sur le sort de l’assurance. La réponse réside en l’acceptation de la clause ou non. Si le bénéficiaire a accepté, plus aucune modification ne peut être faite. Dans le cas contraire, le souscripteur pourra alors changer de bénéficiaire.
Revenons sur cela.
Si le bénéficiaire n’avait pas encore accepté l’assurance-vie, celle-ci revient aux autres bénéficiaires. En l’absence de personne désignée, ce sont les bénéficiaires à titre subsidiaires qui héritent de l’assurance-vie. Dans tous les cas, cette dernière ne tombe pas automatiquement dans les mains des bénéficiaires (Cass, Civ 2ème , 22-09-2005, n° 04-13.077).
S’il n’y a pas de bénéficiaires subsidiaires, le capital tombe dans la succession du souscripteur. Ainsi, lorsque la clause bénéficiaire précise que l’assurance-vie est attribuée « aux enfants, à parts égales, à défaut les héritiers », ce sont les enfants qui doivent bénéficier du capital. Si l’un venait à décéder, le capital serait réparti entre les autres enfants. Si tous les enfants venaient à mourir et qu’il n’y avait pas non plus d’héritiers, le capital tomberait alors dans la succession du souscripteur.
Une autre jurisprudence précise que si la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie désigne comme bénéficiaires « ses enfants par parts égales, nés ou à naître, à défaut de l'un ses descendants, et à défaut ses héritiers », le souscripteur a exprimé par là sa volonté de désigner ses petits enfants comme bénéficiaires de l’assurance-vie au décès de leurs parents. Ainsi, quand un parent est mort, c’est de droit que les enfants pouvaient réclamer l’intégralité du bénéfice de l’assurance-vie. La Cour de cassation a considéré que le souscripteur avait manifesté sa volonté et qu’elle devait être respectée. Il n’en demeure pas moins que le souscripteur doit « le stipuler de manière expresse » (Cass, Civ 2ème, 10-04-2008, n°07.12-992).
Parfois ce sont les juges qui doivent apprécier les termes du contrat et en déduire que le souscripteur de l’assurance-vie souhaitait faire jouer la représentation au profit des enfants du bénéficiaire décédé (Cass, Civ 2ème, 10-04-2008, n°07-12.992). Une règle reste cependant figée : si le bénéficiaire avait accepté le bénéfice, l’attribution de l’assurance-vie au bénéficiaire devient irrévocable (loi 17-12-2007 permettant la recherche des bénéficiaires de l’assurance-vie non réclamés et garantissant les droits des assurés). Il convient alors de préciser que s’il décède avant le souscripteur, la représentation au profit des héritiers ne joue pas, sauf si une clause de représentation a été insérée au contrat (Cass, Civ 2ème, 10-09-2015, n°14-20.017).