L’un de vos parents décède et vous apprenez qu’il avait souscrit un contrat d’assurance-vie. Vous craignez que tout l’héritage puisse alors échapper à la succession et que le montant de l’assurance vie porte atteinte à la part de la succession vous revenant de droit (réserve héréditaire) ? Quelle est la force de la réserve héréditaire face à la transmission des biens rendue possible par l’assurance-vie ? Pouvez-vous être déshérités par l’existence d’un tel contrat ? Existe-t-il des moyens de remettre en cause le contrat d’assurance-vie souscrit par votre père ou votre mère ou encore par votre conjoint ?
La réserve héréditaire est la partie des biens laissés par le défunt qui doit revenir aux héritiers dits « réservataires » c’est-à-dire aux enfants de la personne décédée ou à son conjoint s’il n’a pas laissé d’enfant.
La part réservataire est plus ou moins importante selon le nombre d’enfants du défunt (article 913 du Code civil). En revanche elle est toujours fixe lorsque, en l’absence d’enfant, c’est le conjoint qui est réservataire. La part réservataire, une fois définie, se partage à parts égales entre chaque enfant ; chacun dispose donc d’une réserve individuelle.
Le reste des biens peut être librement donné par le défunt, il s’agit de la quotité disponible (part des biens dont le défunt a pu librement disposer).
La réserve héréditaire est « d’ordre public ». Cela signifie qu’il n’est pas possible d’y déroger, sauf exception (cas d’indignité). Si le défunt a trop donné de son vivant (par des donations) ou après sa mort (par testament), alors l’excédent devra être rendu par les bénéficiaires de ces libéralités aux héritiers réservataires afin qu’ils puissent reconstituer leur réserve. Ils peuvent notamment exercer :
Une indemnité de réduction peut alors leur être attribuée au moment du partage par celui qui a bénéficié d’une donation ou d’un legs trop important.
Si la réserve héréditaire doit être respectée au regard des dispositions du Code civil, l’est-elle vraiment ? Le contrat d’assurance-vie ne permet-il pas d’y porter atteinte ?
Il est possible de transmettre ses biens par la « voie bénéficiaire » c’est-à-dire en utilisant l’assurance-vie. Une personne souscrit un contrat en prévoyant qu’à son décès telle ou telle personne (le bénéficiaire) touchera une somme d’argent. Cette voie permet de souscrire le capital ou la rente à la succession de l’assuré d’après l’article L132-12 du Code des assurances.
Il est même ajouté par cet article que « Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à la succession ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant ».
En d’autres termes, cela signifie que l’assurance vie permet de contourner les obligations liées à la réserve héréditaire. L’assurance-vie est vue comme un moyen légal de contourner la réserve héréditaire dès lors que les enfants en sont exclus. Pas de rapport des sommes à la succession, pas d’action en réduction.
Heureusement, il existe des moyens de contestation et d’action permettant de donner à la réserve héréditaire toute sa fonction protectrice.
Face à cet amoindrissement de l’importance de la réserve héréditaire, il existe des moyens d’action ! Vous pouvez vous battre !
Vu parfois comme un moyen de captation d’héritage, le contrat d’assurance-vie peut être remis en cause à différents égards.
Bien que de nombreux moyens d’action existent, il est toutefois nécessaire d’être encadré et représenté par un professionnel compétent en la matière puisqu’il s’agit de questions complexes. Ce sont des chemins tortueux qui, pratiqués seuls et sans les bonnes armes, peuvent mener à bien des problèmes.
En conclusion, il est vrai que le contrat d’assurance-vie peut permettre de transmettre des sommes qui échapperont à la succession ; toutefois, ce mécanisme n’est pas infaillible et la loi a quand même prévu des moyens de remise en cause.