A la suite du décès de vos parents, vous avez hérité de la maison familiale et vous vous retrouvez en indivision avec vos frères et sœurs. Un des héritiers vous refuse l’accès à la maison et vous vous estimez lésé ? Au détour d’une conversation, un de vos amis vous a conseillé de demander une indemnité d’occupation et vous souhaitez savoir si vous êtes en droit de la réclamer. Focus sur les conditions de versement de l’indemnité d’occupation.
Au décès de leurs parents, et tant que le partage de la succession n’a pas été effectué, les enfants sont en indivision. Un certain nombre de règle sont alors applicables. Lorsque le règlement de la succession s’éternise, l’indivision successorale peut s’avérer compliquée et certains héritiers peuvent être tentés de demander à en sortir.
Selon l’article 815 du Code civil « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision ». Ainsi, en cas de mésentente entre héritiers, le partage pourra en principe être provoqué. En tant qu’héritier, vous aurez également la possibilité de vendre ou donner la quote-part que vous possédez sur le bien indivis.
S’il peut s’agir d’un partage à l’amiable, vous devez savoir qu’il ne sera pas toujours aisé de trouver un terrain d’entente avec les cohéritiers. Certains pourront refuser de partager, et d’autres s’opposer à la vente du bien indivis. Dans ce cas, la sortie de l’indivision peut s’avérer plus compliquée que prévue. Néanmoins, les indivisaires représentants au moins deux tiers des droits indivis pourront demander une autorisation de vendre le bien indivis.
L’article 815-9 du Code civil dispose que « l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. » Ainsi, lorsque plusieurs héritiers reçoivent un bien immobilier en héritage et que seul l’un d’entre eux en use, il devra en principe verser une indemnité d’occupation à ses cohéritiers.
Si le bien reçu est loué à un tiers, les héritiers se partagent les fruits en fonction de leur part dans l’indivision.
En revanche, si le bien est occupé à titre gratuit par un des indivisaires, les autres ne perçoivent rien. L’indemnité d’occupation permet alors de compenser le manque à gagner que constitue cette occupation à titre gratuit.
Votre père vient de décéder et vous héritez d’un appartement en indivision avec votre sœur. Cette dernière occupe le logement et vous vous estimez lésé. Sachez que vous pouvez en principe demander une indemnité d’occupation.
Il est également possible que le bien soit occupé à tour de rôle par les indivisaires dans le respect des droits de chacun. Tel est par exemple le cas lorsque le défunt laisse à ses enfants une résidence secondaire qu’ils décident de garder afin d’en jouir pendant leurs vacances.
L’indemnité d’occupation ne peut en principe être demandée qu’en présence d’un usage ou d’une jouissance privative de la chose. Afin que cette jouissance soit caractérisée, il faut notamment que l’un des indivisaires ait été dans l’impossibilité d’user du bien indivis. Cette définition est toutefois complexe à appréhender, c’est la raison pour laquelle la Cour de cassation a, à maintes reprises, été amenée à se prononcer sur la notion de jouissance privative d’un bien indivis.
Ainsi, dans un arrêt en date du 31 mars 2016 (n°15-10.748), elle a précisé que « la jouissance privative d’un immeuble indivis résulte de l’impossibilité de droit ou de fait pour les co-indivisaires d’user de la chose ». En l’espèce, deux héritiers refusaient de remettre les clés de la porte d’entrée au troisième, lui empêchant ainsi l’accès aux lieux. Il y avait donc jouissance privative et exclusive du bien par les héritiers en possession des clés.
Les héritiers qui souhaiteraient demander une indemnité d’occupation devront en principe agir dans un délai de cinq ans après la date à laquelle les fruits ont été perçus ou auraient pu l'être. Il ne faut alors pas confondre ce délai avec celui de trente ans qui permet à un créancier de poursuivre l’exécution d’un jugement condamnant le débiteur au paiement d’une somme payable à termes périodiques (Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 10 juin 2005, 03-18.922). L’héritier ne peut en effet pas « obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande ».
Le montant de l’indemnité d’occupation peut être fixé librement par les parties. Par exemple, si les héritiers sont au nombre de trois et que le bien occupé par l’un d’entre eux à titre privatif a une valeur locative de 900 euros, ils pourraient décider que les deux héritiers privés de la jouissance de bien se verront accorder 300 euros chacun.
Il est toutefois fréquent que les héritiers rencontrent des difficultés à trouver un accord. Dans ce cas, l’intervention d’un juge pourra s’avérer nécessaire.
Il convient enfin de préciser que les héritiers pourront, d’un commun accord, décider de renoncer à l’indemnité d’occupation.
Si comme bon nombre de nos lecteurs vous vous poser des questions qui relèvent du droit des successions, consultez notre Forum qui traite de ces problématiques.