Quand un des héritiers est lui-même décédé au moment du partage, ce sont ses enfants qui le deviennent à leur tour. C'est le principe dit de "la représentation".
Dans le cadre de la procédure du rescrit fiscal n°2010/58 du 28 Septembre, la Direction générale des Finances publiques a estimé opportun d'effectuer un point complet sur ce mécanisme au regard des droits de mutation à titre gratuit.
Dans sa réponse particulièrement exhaustive, l'Administration fiscale tient tout d'abord à préciser et (ou) à rappeler le champ d'application de la représentation :
1. Application du mécanisme de la représentation en matière de succession :
10. La représentation s'applique aux successions "ab intestat" :
Conformément aux articles 751 et suivants du Code civil, la représentation permet d'appeler à la succession les représentants aux droits du représenté.
On représente les prédécédés et les renonçants à une succession.
La représentation a lieu à l'infini dans la ligne directe descendante et, en ligne collatérale, en faveur des descendants des frères ou sœurs du défunt.
Par contre, s'agissant des successions réglées par la volonté du défunt, une disposition testamentaire est caduque si celui en faveur duquel elle a été faite n'a pas survécu au testateur (sauf s'il résulte clairement des termes du testament que l'intention de son auteur était d'appeler les descendants du légataire, en cas de prédécès de ce dernier, au bénéfice du legs).
Ainsi, la représentation n'existe pas à l'égard des dispositions testamentaires. Si le testateur a appelé, dans le testament, les descendants du légataire au bénéfice du legs, ceux-ci bénéficient du legs par la volonté du testateur et non par l'effet du mécanisme de la représentation.
Sur le plan fiscal, le Service de la Législation à Bercy souligne que les articles 777 et 779 du Code général des impôts permettent d'appliquer la représentation aux seules successions "ab intestat", c'est-à-dire sans testament et dont les biens sont attribués aux héritiers selon les règles fixées par la loi civile.
11. En matière de succession, la représentation ne s'applique, sauf dérogation, qu'en cas de pluralité de souches :
En application des articles 752 et 752-2 du Code civil, la représentation étant destinée à assurer l'égalité entre les souches, elle postule leur pluralité et ne peut donc pas jouer en présence d'une souche unique.
Par exception, en matière fiscale, il est dérogé à ce principe pour les héritiers en ligne directe descendante.
En effet, dans la situation où un petit-enfant est appelé à la succession de son grand-père du fait du prédécès de son père, enfant unique, la doctrine administrative admet l'application de l'abattement prévu à l'article 779 I. du C.G.I. en faveur de l'enfant prédécédé sur la part successorale revenant au petit-enfant.
Pour les collatéraux, aucune dérogation n'est admise. La représentation ne s'applique qu'en cas de pluralité de frères ou sœurs du défunt, vivants ou ayant des descendants (conf. réponse du 26/1/2010 à la question écrite n° 54899 de M. Jean-Jacques CANDELIER, député du Nord).
Selon le fisc, la circonstance qu'une succession est dévolue à des neveux issus de parents différents qui ne sont pas en concurrence avec des héritiers vivants d'un degré plus proche, c'est-à-dire des frères ou sœurs du défunt, ne fait pas obstacle au mécanisme de la représentation.
En présence d'une pluralité de frères ou sœurs du défunt, ce dispositif ne peut cependant être invoqué lorsqu'il y a renonciation des autres souches, laissant ainsi un seul ou des neveux issus du même frère ou de la même sœur pour recueillir la succession.
2. La représentation ne s'applique pas aux sommes transmises dans le cadre d'un contrat d'assurance-vie :
Conformément à l'article L. 132-12 du Code des assurances, les sommes payées en vertu d'un contrat d'assurance-vie à un bénéficiaire déterminé ne font pas partie de la succession de l'assuré. Dans cette situation, les droits de mutation par décès sont donc calculés suivant le degré de parenté existant entre le bénéficiaire et l'assuré décédé (conf. article 757 B. du C.G.I.).
L'assurance-vie étant une stipulation pour autrui, lorsqu'aucun bénéficiaire n'est déterminé, ou que celui-ci est décédé, les sommes viennent s'ajouter à l'actif successoral. Il n'est donc pas possible de jouir d'un contrat d'assurance-vie par représentation d'un bénéficiaire prédécédé.
Dans le cas particulier où le bénéficiaire désigné décède après l'assuré, mais sans avoir déclaré son acceptation, et en l'absence de bénéficiaire en sous-ordre, les sommes reviennent aux héritiers du bénéficiaire (conf. arrêt de la Cour de cassation, 1ère Chambre civile, du 9/6/1998).
3. Application du mécanisme de la représentation en droit fiscal pour certaines transmissions à titre gratuit entre vifs :
La représentation s'applique aux donations consenties en ligne directe aux descendants des enfants ou petits-enfants, décédés, du donateur. Et la Direction générale des Finances publiques admet, en présence d'une seule souche, l'application des abattements stipulés respectivement aux articles 779. - I. et 790 B. du C.G.I.
A contrario, elle rappelle que le mécanisme de la représentation ne s'applique pas aux donations consenties en ligne collatérale, aux descendants des frères ou sœurs du donateur.
Dans sa réponse, l'Administration fiscale précise aussi que la représentation s'applique aux dons familiaux de sommes d'argent consentis, à défaut d'héritiers en ligne directe, aux descendants de neveux, mais uniquement en présence d'une pluralité de souches.
Enfin, les responsables de Bercy rappellent qu'en cas de donation-partage faite à des descendants de degrés différents, l'article 784 B. du C.G.I. exclut expressément toute représentation. Les droits sont liquidés en fonction d'une part, du lien de parenté entre l'ascendant donateur, d'autre part, de la répartition du patrimoine entre les descendants.
4. Descendants d'adoptés simples répondant aux conditions prévues à l'article 786. 6° du C.G.I. :
Pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, il est tenu compte du lien de parenté résultant de l'adoption simple pour les transmissions effectuées en faveur de certains adoptés.
Les dispositions de l'article précité prévoient que cela s'applique aux transmissions faites en faveur des successibles en ligne directe descendante de ces adoptés simples.
Ainsi, s'agissant de la succession de l'adoptant, les descendants de l'adopté, prédécédé, peuvent bénéficier, par représentation, de l'abattement prévu pour les enfants.
Il est à noter qu'en application de l'article 368 du Code civil, la représentation s'applique aux adoptés simples.
De même, si l'adoptant consent une donation aux descendants de l'adopté, décédé, l'abattement est applicable aux enfants.
Enfin, dans le cas de la succession d'un frère de l'adoptant, lorsque celui-ci est prédécédé, l'adopté vient en représentation conformément à l'article 779. IV. du C.G.I.
Sur le mécanisme de la représentation, on constate une fois de plus qu'à quelques nuances près, la Législation fiscale se trouve bon gré mal gré, obligée de s'aligner sur les principes édictés au Code civil.
Nous évoquerons une prochaine fois les conséquences fiscales concrètes au regard des modalités de calcul des droits de mutation à titre gratuit, résultant des précisions apportées récemment par le fisc.