Dans le cadre d'une succession, une personne peut obtenir le droit d'utiliser un bien sans pour autant en être le propriétaire. On parle alors d'usufruit. De quoi s'agit-il réellement ? Et comment cela fonctionne-t-il ?
L'usufruit désigne étymologiquement le droit d'user d'un bien, et d'en percevoir le fruit. Il peut s'agir d'un immeuble, d'un véhicule, d'un meuble, d'un fonds de commerce, ou de valeurs telles que des actions ou de l'argent. Lorsqu'une personne est simultanément titulaire de la nue-propriété et de l'usufruit d'un bien, elle en est considérée comme la pleine propriétaire. À ce titre, elle peut en disposer à sa guise, c'est-à-dire l'utiliser, le vendre, le modifier, le louer, ou le prêter.
Dans le cadre d'une succession, plusieurs situations peuvent conduire à la désignation d'un usufruitier. Par exemple, en cas de veuvage, le statut d'usufruitier revient au conjoint survivant. Par testament, une personne peut léguer l'usufruit d’un bien à un proche. Elle peut également le céder par contrat de donation ou de vente de son vivant. Un parent peut aussi devenir l'usufruitier d'un bien donné pour le compte de son enfant.
Le statut d'usufruitier confère à une personne plusieurs droits.
Tout d'abord, l'usufruitier a le privilège d'utiliser le bien dans son intérêt personnel, et ce, en « bon père de famille ». En clair, il est invité à en faire un usage responsable. S'il s'agit d'un immeuble, il a le droit d'y habiter. Il a même la possibilité de mettre le bien dont il a l'usufruit en location. Il est habilité à percevoir les revenus qui proviennent du bien concerné. Il peut s'agir par exemple de loyers, ou de bénéfices générés par un fonds de commerce.
Enfin, qu'il soit le conjoint survivant, ou un tiers, l'usufruitier a la prérogative de procéder à la vente ou la cession de son droit d'usufruit. Par contre, il n'est pas autorisé à décider de la mise en vente du bien. Ce droit échoit uniquement au nu-propriétaire. Il est donc impératif qu'il obtienne l'accord de ce dernier avant de procéder à la vente de l'immeuble, ou du bien meuble.
L'usufruitier a également des obligations dont il doit s'acquitter. Il est appelé à garantir la conservation de l'état du bien dont il a l'usufruit. Il est souvent nécessaire qu'un inventaire soit réalisé pour statuer sur l'état initial dudit bien. Il assure, à ses frais, l'entretien de tous les biens inclus dans l'usufruit de succession. Il n'est pas en mesure de réclamer une éventuelle compensation financière pour cette tâche.
L'usufruitier prend en charge la taxe d'habitation et la taxe foncière dans le cas où l'usufruit concernerait un bien immobilier. S'il le met en location, il a l'obligation de s'acquitter des impôts sur le montant des loyers perçus. En ce qui concerne les frais de grosses réparations (poutres, fondations, murs, toitures), ils n'incombent pas à l'usufruitier.
La détermination de la valeur de l'usufruit se fait sur la base de deux types de barèmes.
Il consiste à attribuer une valeur à l'usufruit par l'application d'une décote sur la valeur réelle en pleine propriété du bien. Ladite décote varie en fonction de l'âge de l'usufruitier. Elle est prévue à l'article 669 du Code général des impôts :
Au-delà, la décote est de 10 %. À titre d'exemple, un logement vaut 600 000 euros. Décédé à 64 ans, le propriétaire défunt lègue la nue-propriété à ses enfants mineurs. Pour déterminer la valeur de l'usufruit du bien immobilier, il suffit de faire : 600 000 euros × 40 % = 240 000 euros. Quant à la valeur de la nue-propriété, elle donne : 600 000 euros – 240 000 euros = 360 000 euros.
Lorsque l'usufruit est temporaire, il a une valeur de 23 % de celle de la pleine propriété par tranche de 10 ans. Par exemple, un bien immobilier est donné en nue-propriété pour une durée de 15 ans. Il vaut 200 000 euros. Pour déterminer la valeur de l'usufruit temporaire, il faudra faire : 23 % × 2 × 200 000 euros = 92 000 euros.
L'usufruit n'est pas un droit indéfini. Dans le cadre d'une succession, la loi prévoit les cas dans lesquels l'usufruitier ne pourra plus continuer à bénéficier de ses prérogatives. Tout d'abord, pour une personne physique, l'usufruit a un caractère viager, c'est-à-dire qu'il prend fin avec le décès de l'usufruitier. Par ailleurs, lorsque le propriétaire confie l'usufruit de son bien à une personne morale, le délai d'extinction du droit est fixé à 30 ans maximum.
Dans le cas où le propriétaire confierait l'usufruit de son logement par un contrat, il y inclut la date limite. Lorsqu'un parent est l'usufruitier pour les biens de son enfant mineur, il perd l'usufruit à la majorité de ce dernier. Aussi, il est possible de retirer à un usufruitier son droit de propriété en cas d'importante dégradation du bien dont il a l'usufruit. Par ailleurs, à la fin de période d'usufruit, le nu-propriétaire retrouve son statut de plein propriétaire du bien.