Votre père vient de décéder et disposait d’une somme importante sur son compte bancaire. Peu de temps après son décès, vous vous apercevez que des retraits d’argents injustifiés ont été effectués. Et s’il s’agissait d’une spoliation d’héritage ou d’un recel successoral ? Vous vous interrogez sur vos droits et souhaitez savoir ce que vous pouvez faire ? Ces quelques lignes vont vous aider à y voir plus clair.
La spoliation d’héritage également appelée recel successoral consiste à détourner volontairement des biens d’une succession (article 778 du Code civil). Ces infractions se matérialisent par un élément matériel (ex. : dissimulation d’argent) et un élément intentionnel (ex. : mauvaise foi de l’héritier visant à rompre l’égalité entre héritiers).
Un arrêt de la Cour de cassation du 12 septembre 2012 illustre cette situation (Cour de cassation, Première chambre civile, 12 septembre 2012, pourvoi n° 11-15006). En l’espèce, un couple avait eu trois enfants. La mère avait consenti quatre procurations au profit de son unique fille. Par la suite, la mère est placée sous tutelle judiciaire et sa fille devient son administratrice. Au décès de la mère, la fille effectue de nombreux retraits d'argent sur le compte bancaire de sa défunte mère. Se sentant lésés, ses frères demandent la réintégration de ces sommes à la succession et que leur sœur soit reconnue coupable de recel successoral.
Avant d’intenter une action en recel successoral, il vous faut rapporter la preuve des faits. Les frères ont ainsi dû prouver que leur sœur avait « l’intention de porter atteinte à l’égalité du partage ». Dans une telle situation, le droit insiste sur le fait que l’égalité entre héritiers doit être rétablie. A cette fin, le recel successoral prévoit l’obligation pour une personne s’étant rendue coupable de telles manœuvres de réintégrer les sommes à la succession.
Attention ! Dans notre cas d’espèce, les juges ont soulevé la question de l’entretien de la personne au-delà de la piété familiale. En effet dans une telle situation, les juges peuvent considérer que la personne n’a pas commis de recel successoral et n’a fait qu’assister le défunt parent dans sa fin de vie.
Sachez qu’en tant qu’héritier, vous devez rédiger une déclaration de succession dans les 6 mois suivants le décès de votre parent (article 800 du Code général des impôts). Cette déclaration doit permettre à l’Administration fiscale de faire un contrôle sur la situation financière du défunt. Elle peut notamment veiller à qu’aucune somme n’ait été retirée injustement sur le compte du de cujus. Attention au respect du délai ! En effet en cas de retard vous serez sujet au paiement de pénalité de retard.
Afin de procéder au contrôle de ces biens, l’Administration fiscale va prendre en compte l’ensemble des biens faisant partie de la propriété du défunt jusqu’à un an avant sa mort (article 752 du Code général des impôts). Ainsi en vertu de cet article, « sont présumées, jusqu'à preuve contraire, faire partie de la succession, pour la liquidation et le paiement des droits de mutation par décès, les actions, obligations, parts de fondateur ou bénéficiaires, biens ou droits placés dans un trust défini à l'article 792-0 bis, parts sociales et toutes autres créances dont le défunt a eu la propriété ou a perçu les revenus ou à raison desquelles il a effectué une opération quelconque moins d'un an avant son décès ». Il ne s’agit toutefois que d’une présomption simple.
En effet, vous pouvez démontrer que le bien n’était plus la propriété du défunt, notamment en cas de vente. Pour prouver cette vente, la facture ou encore l’acte de vente suffiront. Il est donc indispensable de se constituer des preuves afin d’éviter tout contentieux avec l’Administration fiscale.
En outre, l’Administration fiscale peut veiller à ce que les sommes retirées sur le compte du défunt furent réutilisées. Cela intervient dans le cadre de la détermination des biens pouvant faire l’objet des droits de mutation à titre gratuit (article 750 ter Code général des impôts). Pour terminer, une jurisprudence judiciaire permet d’avoir une illustration de ces précédentes dispositions (Cour de cassation, chambre commerciale, 12 octobre 2010, pourvoi n° 09-68401).
En l’espèce, peu de temps avant son décès une femme avait retiré une somme conséquente sur son compte bancaire. Elle avait préalablement institué un proche légataire universel. Ultérieurement l’Administration a décidé de réintégrer les sommes retirées à l’actif successoral. La légataire universelle a contesté cette réintégration. En l’espèce, les juges avaient constaté :
En s’appuyant sur ces différents faits, l’Administration fiscale avait alors à bon droit réintégré ces sommes à l’actif successoral.
Ainsi en matière de droit des successions, il convient de faire attention à toutes les sommes retirées avant le décès du proche afin d’éviter d’être rattrapé par l’Administration fiscale.