Que ce soit par passion, pour un investissement économique ou à l’origine d’un héritage familial, être propriétaire d’œuvres d’art implique certaines conséquences fiscales. Du point de vue plus particulier des successions, la France est un des pays avec l’une des impositions la plus lourde parmi ses voisins européens et au niveau mondial. Vous êtes propriétaire d’une ou plusieurs œuvres d’art et vous souhaitez y voir plus clair concernant l’imposition de la transmission de celles-ci ? Focus sur ce que vous devez savoir !
Le point important dans l’estimation d’une œuvre d’art est la possible qualification de l’œuvre comme meuble meublant (destiné à l'usage et à l'ornement des appartements). Les tableaux et les statues qui font partie des meubles d'un appartement y sont aussi compris, mais non les collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières.
Selon la qualification retenue, la méthode d’évaluation varie. En effet, si l’œuvre d’art ne peut pas être qualifiée de meuble meublant, la lecture de l’article 764 du CGI, imposerait l’ordre suivant de raisonnement pour déterminer la valeur :
En revanche, si l’œuvre d’art peut être qualifiée de meuble meublant, dans ce cas l’Administration fiscale, en prenant appui sur la jurisprudence de la Cour de cassation, donne une interprétation de l’article 764 du CGI (BOFIP) qui impose l’ordre d’évaluation suivante :
Il existe un autre cas, bien que minoritaire, celui où les œuvres sont détenues par une personne morale. La succession concernera alors les actions ou droits détenus par le de cujus sur cette entité, ce seront alors ces derniers qu’il faudra valoriser.
L’évaluation d’une œuvre d’art est souvent problématique lorsque l’œuvre d’art a été acquise par transmission. En effet, un collectionneur connaît souvent la valeur d’une œuvre qu’il détient, bien que le marché de l’art réserve souvent des surprises.
En principe, dès lors que le défunt était fiscalement domicilié en France au moment du décès, toute la succession est imposable en France, peu importe où se trouvent les éléments du patrimoine et où se trouvent les bénéficiaires (la domiciliation est établie grâce à l’article 4 b du CGI).
Dans l’hypothèse où le défunt décède et qu’il n’est pas domicilié en France, si ses héritiers sont domiciliés en France (bénéficiaires de la succession) tout ce qu’ils recueillent de la succession est imposable en France, peu importe où ses éléments se trouvent.
Enfin, si le de cujus est domicilié hors de France et les héritiers également, les droits de succession français peuvent encore s’appliquer mais uniquement à raison de la valeur des biens situés en France.
Le champ d’application des droits de succession est très large et recouvre un grand nombre de situation. Il existe parfois des conventions fiscales prévoyant l’élimination de la double imposition mais ce n’est pas la norme. Par exemple, il n’existe aucune convention fiscale en matière successorale entre la France et la Suisse.
Il faut bien faire attention à ces notions qui peuvent faire varier l’imposition du tout au tout.
Il convient en outre de s’intéresser à l’assiette des droits de succession : c’est la part de l’actif net successoral revenant à chaque bénéficiaire. Les droits de succession en France sont payés par chacun des bénéficiaires à hauteur de la part recueillie dans la succession. À noter que le conjoint ou le partenaire de PACS est exonéré des droits de succession. Certains biens et actifs sont susceptibles d’être exonérés, tels que les monuments historiques. Cela implique la signature d’une convention avec le Ministère de la Culture, laquelle fixe notamment les modalités de l’ouverture au public.
Sur la part recueillie par chaque héritier, on va appliquer un abattement dont le montant va varier en fonction du lien de parenté avec le défunt. L’abattement le plus important est pour celui en ligne directe, plus précisément sur la part recueillie sur chacun des ascendants ou la part de chacun des enfants vivants ou représentés. Cet abattement est de 100 000€. Sur le montant restant, il faudra alors appliquer le barème progressif sur les droits de succession. Ensuite, il y a un abattement entre frères et sœurs qui est de 16 000€, puis celui en faveur de nièces et de neveux de 8 000€ et enfin l’abattement par défaut de 1 594€ qui s’applique à toutes les autres successions.
Le barème progressif des droits de succession :
En ligne directe :
0 - 8000€ |
5% |
8 000 – 12 000€ |
10% |
12 000 - 16 000€ |
15% |
16 000 - 552 000€ |
20% |
552 – 902 000 |
30% |
902 000 - 1 805 000 |
40% |
À partir de 1 805 000 |
45% |
Succession entre frères et sœurs :
0 – 25 000 € |
35% |
À partir de 25 000€ |
45% |
En pratique, l’abattement de 16 000€ va d’abord s’appliquer et sur l’actif successoral, les premiers 25 000 sont imposés à 35% et le reste à 45%.
Entre parents jusqu’au 4ème degré inclusivement :
Le barème est fixé à un taux de 55% et si le lien de parenté est supérieur au 4ème degré, dans ce cas, le taux applicable est de 60%.
Il faut faire attention à un certain point qui rattache le droit des successions avec celui des donations, en effet un lien entre les deux est assez important : le rappel fiscal des donations antérieures.
Il faudra ajouter à la succession fiscale les montants de donation antérieurement reçus. Si une donation de 100 000€ a été effectuée, il faudra les ajouter au montant reçu par voie de succession. Actuellement le délai du rappel est de 15 ans.
La loi Malraux adoptée en 1968 prévoit une disposition spécifique en rapport avec le droit des successions : elle a instauré le mécanisme de la dation en paiement.
Le principe de la dation en paiement est de payer les droits de succession avec l’œuvre d’art.
La dation en paiement suppose un accord de volonté entre le contribuable et l’État. En effet, un agrément est requis : le mécanisme n’est pas automatique et l’État est libre de refuser une œuvre qui aurait un intérêt artistique ou historique moindre et qu’il ne voudrait pas inclure dans le domaine public.
Les biens concernés sont définis de manière assez large, objet d’art, livre, objet de collection, documents de haute valeur artistique.
Le contribuable va faire une offre qui va faire l’objet d’une décision et si la décision ne lui convient pas, il a la possibilité de rejeter la décision.
La dation elle est possible que lorsque l’impôt est d’au moins égal à 10 000 euros, ce qui implique que la valeur libératoire de l’œuvre doit être relativement importante. Toutefois en cas de valeur supérieure de l’œuvre d’art à l’impôt dû, aucune soulte ne peut être réclamée, cette valeur est perdue.