Dimanche 14 juillet 2013, la doyenne des Français est décédée. Suzanne Burrier, habitant Montluçon et âgée de 112 ans, avait succédé à Irénise Moulonguet du même âge. Avec l’allongement de la durée de vie, des questions qui peuvent paraître mineures prennent toute leur importance. En effet, dès lors que le parent est centenaire, il est fort probable malheureusement qu’il voit ses enfants disparaître avant lui. Que se passe-t-il pour la succession lorsque les enfants n’ont pas de descendant ? Quid de ces centenaires qui n’ont aucun héritier ?
Il existe deux processus permettant aux parents d’hériter de leurs enfants : le droit de retour et la dévolution successorale légale.
Le droit de retour permet aux père et mère de récupérer une partie des biens donnés en cas de décès du donataire. Ce droit s’exerce à hauteur d’1/4 des biens ainsi transférés.
L’application de ce droit peut donner lieu à des difficultés comme le soulève l’arrêt de la Cour de Cassation du 10 juillet dernier.
En l’espèce, un jugement admettait que les créanciers hypothécaires du de cujus soient « payés selon leurs droits privilégiées et leurs créances admises au passif » de celui-ci. Le liquidateur avait ainsi vendu un bien immeuble pour pouvoir acquitter les dettes. Or le bien en question était une donation des parents soumis au droit de retour.
L’article 952 du Code Civil dispose que « L'effet du droit de retour est de résoudre toutes les aliénations des biens et des droits donnés, et de faire revenir ces biens et droits au donateur, libres de toutes charges et hypothèques, excepté l'hypothèque légale des époux si les autres biens de l'époux donataire ne suffisent pas à l'accomplissement de ce retour et que la donation lui a été faite par le contrat de mariage dont résultent ces charges et hypothèques ».
La Cour de Cassation rend donc un arrêt de cassation en déclarant qu’en « statuant ainsi, alors qu’elle avait retenu que par l’effet du droit de retour que s’étaient réservé les donateurs, le bien litigieux était devenu indivis entre l’un de ceux-ci, puis sa succession, et la succession du de cujus… ce dont il résultait que les droits des créanciers hypothécaires inscrits du chef de celle-ci étaient subordonnés au sort du bien dans le partage, la Cour d’Appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les textes susvisés ».
Parallèlement à ce droit de retour qui ne touche que les donations faites par les ascendants, le Code Civil a mis en place des règles permettant aux père et mère d’être les héritiers de leurs enfants prédécédés.
En effet, la dévolution légale de la succession prévoit le cas où l’enfant décède avant ses parents. La part des parents est fonction de la présence ou non du conjoint.
En présence de ce dernier, les parents ont vocation à recueillir la moitié de la succession, soit 1/4 chacun, et le conjoint survivant l’autre moitié. Si un seul des parents est en vie, il a droit à 1/4 tandis que le conjoint aura 3/4 de la succession.
Dès lors qu’il n’y a pas de conjoint, les parents ont droit à la moitié chacun. Néanmoins, en cas de présence de privilégiés collatéraux (frère et sœur), les parents auront 1/4 chacun et les frères et sœurs présents se partageront la moitié restante.
Après avoir abordé le décès de l’enfant antérieurement à son parent, il convient d’envisager le cas du décès sans descendant. En effet, que se passe-t-il, par exemple, lorsque le centenaire n’a pas de descendance ou bien que celle-ci n’est plus en vie ?
Dès lors que le défunt n’a plus aucune famille (ni ascendant ou descendant, ni collatéraux), il y a de forts risques pour que la succession tombe en déshérence.
Dans ce cas-là, la propriété des biens sera transférée à l’État après la demande d’envoi en possession de la succession. Cela est prévu par l’article 811 du Code Civil qui dispose que « Lorsque l'État prétend à la succession d'une personne qui décède sans héritier ou à une succession abandonnée, il doit en demander l'envoi en possession au tribunal ».
L’héritier apparaissant tardivement peut, si les conditions le permettent, réclamer à l’Etat sa part de la succession en déshérence.
Source : vosdroits.service-public.fr, « Droits à la succession des ascendants », Mis à jour le 16/06/11 et LePoint.fr, « La doyenne des Français est morte à 112 ans », le 18/07/13 + Arrêt du 10/07/13 de la Cour de Cassation (n°12-20.885, 762), n° JurisData : 2013-014431